Le mardi 8 novembre le Club a accueilli David Guévart, directeur de Paris Normandie arrivé en début d’année, pour un petit-déjeuner rencontre animé par Julie Guesdon, journaliste indépendante et administratrice du Club. Cette matinée a été l’occasion pour chacun de mieux comprendre sa volonté de faire évoluer le journal.

Un positionnement qui doit changer

L’entreprise, malgré sa forte image de marque, a beaucoup souffert notamment à cause de la numérisation et l’audiovisuel. L’audience est toujours haute et les journalistes continuent de booster le territoire, mais le modèle économique, essentiellement fondée sur le format papier, n’est plus suffisamment viable et remet en doute la pérennité du journal. La direction cherche ainsi activement à faire muter Paris Normandie pour suivre les pratique du lecteur.

Même s’il reste un marqueur fort, le journal papier a beaucoup de difficultés, la tonne de papier est passé de 450€ à plus de 1 000€ aujourd’hui. Couplé à la montée des matières premières annexes comme l’encre, le coût de l’électricité ou bien encore les prix du transport, le journal papier est à la limite de faire perdre de l’argent. Et l’époque où le journal papier finançait le numérique est donc révolue.

Le cas de Paris Normandie au Havre est également éclairant. La ville comptait deux éditions : Le Havre libre et Le Havre presse, une édition en rouge une autre bleue. Les lecteurs d’une édition ne lisait pas l’autre et vice-versa. Quand le quotidien a passé ces éditions sous l’intitulé unique “Paris Normandie” le même qu’à Rouen, les lecteurs havrais n’ont pas suivi immédiatement. C’est pourquoi Le Havre est devenu le terrain expérimental de la direction. Ils ont retravaillé le logo de la Une havraise, transmis une grande partie des pouvoirs à l’éditeur délégué, notamment sur les choix éditoriaux et marketing. De plus, le choix des premières pages donne la priorité au local et ne se fonde plus sur la simple hiérarchisation de l’information. Une expérimentation qui pour le moment n’est pas prévue à Rouen, pourtant siège du média.

Des changements dans la consommation de l’information

Un changement important de consommation de l’information s’est fait sentir avec une mutation qui pousserait les lecteurs à chercher avant tout du divertissement. Mais aussi la peur de mal vendre certains sujets, notamment politiques qui pourraient s’avérer être de « trop élitiste » pour le lecteur ou bien encore l’écologie qui ne “cartonnerait pas trop en audience”. C’est pourquoi Paris Normandie doit changer d’angle et proposer le contenu le plus important, le plus divertissant, drôle, spectaculaire. Faire vivre en créant de l’histoire, incarner l’information sans pour autant s’éloigner de la vérité et de son impartialité, créer le débat sur tous les sujets, chercher à choquer le lecteur, le faire réagir pour confronter les points de vue. Le but étant d’accrocher le lecteur pour le nourrir ensuite d’enquêtes et de sujets plus profonds, plus poussés et l’ouvrir à des articles qu’il n’aurait pas spontanément lus.

Quand il est interrogé sur les rapports entre les médias et le monde politique, David Guévart estime que les liens sont compliqués. Les pouvoirs politiques détiennent la possibilité de guider l’économie notamment grâce aux annonces légales qui sont indispensables pour Paris Normandie. Le problème étant que de plus en plus de personnalités politiques surveillent leurs images et veulent imposer des conditions sur la ligne éditoriale. Il parait donc important de savoir sacrifier un peu d’argent pour garder son impartialité.

Il faut également reconstruire le dialogue entre presse et communicants. Force est de reconnaître que les conférences de presse n’attirent plus autant les journaliste. Ces derniers ne souhaitent pas sortir la même information que les concurrents.

À la fin de la rencontre de nombreuses questions restaient en suspens, peut-être une raison pour un nouveau petit déjeuner.